Messali
Hadj Communiqué
par le service de presse des éditions l'Harmattan
mai 2004 Il y a deux ans,
Jacques Simon avait publié une biographie de
Messali Hadj sous forme d'une chronologie
commentée. Paraissent maintenant deux ouvrages
qu'il consacre à l'Etoile nord-africaine et au
MTLD (Mouvement pour le triomphe des libertés
démocratiques), deux des mouvements fondés
et dirigés par Messali Hadj. Jacques Simon,
docteur en histoire et président du Centre de
recherche et d'étude sur l'Algérie
contemporaine (CREAC), fut aussi un militant
indépendant, engagé dans le MTLD en 1954.
C'est dire si sa recherche, quoique sérieuse et
fondée sur une documentation ' très
abondante {archives et témoignages>, n'est pas
" neutre " et détachée de son
objet. Le premier
mérite du livre consacré à l'Etoile
nord-africaine, premier mouvement indépendantiste
algérien organisé, créé en
1927> est de montrer de manière
détaillée ce qu'an savait
déjà : il fut une création du Parti
communiste français. Jacques Simon,
dès les premières lignes de Sa "
Présentation ", contredit le mythe d'un
nationalisme algérien qui trouverait son origine
dans les révoltes d'Abd el-Kader; sous la
Restauration. L'Etoile Nord-Africaine,
créée à l'initiative des communistes
français et recrutant d'abord en métropole
parmi les immigrés Nord-Africains, a
été la source véritable de
l'indépendantisme algérien au XXe
siècle. [
] Jacques Simon
montre le lien plus qu'étroit entre ces premiers
indépendantistes nord-africains - et l'appareil
communiste : " Le premier noyau est formé de
cadres de 25-30 ans (la génération des
années 1890), presque tous d'origine manuelle,
ouvriers ou marchands ambulants mais en fait -des
révolutionnaires professionnels, très
actifs et possédant une bonne culture politique;
capables d'intervenir dans les congrès, les
commissions et les conférences du parti.
" Messali Hadj va
être le secrétaire général de
l'Etoile nord-africaine. Il n'est plus un pauvre "
travailleur immigré " mais un permanent du PCF,
responsable du recrutement, de la formation es de la
propagande au sein du mouvement
indépendantiste. La suite de
l'histoire de l'ENA est celle d'une prise de distance
avec le PCF et d'une première implantation,
très tardive (1934), en Algérie. Le
début de 1937 voit la dissolution de l'ENA
(à la demande du PCF) et sa renaissance sous
l'appellation PPA (Parti du peuple
algérien). Le
MTLD Le second ouvrage
publié par Jacques Simon étudie un autre
avatar du messalisme : le MTLD, qui a
succédé au P PA en 1947. Jusqu'au
déclenchement de la guerre d'Algérie, en
novembre 1954, le MTLD mène un double jeu : il
choisit la voie des urnes lors des élections
municipales . de 1947 et lors dé l'élection
de l'Assemblée algérienne en 1948 ; mais en
1950, en son sein, apparaît une organisation
clandestine f®S (Organisation spéciale),
chargée de former des militants aux techniques de
la guerre: révolutionnaire. L,'insurrection du
ler novembre 1954 ne se fait pas à l'initiative
de Messali Hadj et peut apparaître comme le
résultat de luttes intestines entre des
indépendantistes divisés sur les moyens
à employer. La suite de l'histoire verra ces
luttes intestines s'amplifier: pendant la guerre
d'Algérie, les règlements de comptes entre
" messalistes " et FLN ensanglanteront les rues de Paris
et d'ailleurs. Mais c'est une
autre histoire que Jacques Simon racontera, sans doute,
dans un prochain livre. Les deux, ouvrages publiés
sur l'ENA et le MTLD contiennent des chronologies
très détaillées, des notices
biographiques et reproduisent de nombreux documents
utiles. On pourra néanmoins leur faire un grand
reproche : ils racontent l'histoire des mouvements
indépendantistes algériens successifs sans
évoquer les populations européennes
d'Algérie. Lé prochain livre de Jacques
Simon, ,Guerre et révolution en Algérie
(1954-1962), ne pourra les passer sous
silence.
Yves Chiron